lundi, juin 08, 2015

colloque sur le couple entraîneu athlète .... extrait de colloque



SUR LE TERRAIN

La rubrique Sur le terrain va emmener une équipe de reporters éclairés par la psychanalyse à la rencontre des actrices et des acteurs de différentes institutions de France, de Navarre et de Belgique. Trois équipes (et plus si affinités !) seront à la manœuvre : Bordeaux, Paris et Belgique.

Notre moyen privilégié : de courtes interviews visant à cerner un ou deux points où « Faire couple » résonne dans une pratique, dans un lieu. Quelle est la nature de ce lien ? Quelles formes prend-il à l’heure de l’amour liquide (Zygmunt Bauman) ? Comment se manifeste-t-il dans la clinique ? Y seront interrogés le couple amoureux, amical mais aussi patron-employé, entraineur-sportif, et encore médecin-patient, éducateur-ado, enfant-institution …

photo sur le terrain

L’entraîneur et le sportif : drôle de couple ! Entretien avec Patrice Ragni

Cet espace du temps passé avec l’entraîneur, c’est parfois dans le corps vivant de l’athlète que s’en réalise l’intensité.

Propos recueillis par Françoise Labridy
Patrice Ragnni, vous êtes entraîneur depuis de nombreuses années, si je vous dis : « l’entraîneur et le sportif : drôle de couple », que me répondez vous ?
Le couple, c’est d’abord ma relation à ma femme Karolle, ensuite les athlètes un par un. Ma liaison à Karolle a été qualifiée de sacerdoce par l’intendant du collège où j’ai commencé à travailler comme professeur d’éducation physique au lendemain de notre mariage. Elle pouvait apparaître pour une part totalement irrationnelle compte tenu des écarts entre nous (milieux familiaux, principes éducatifs, centres d’intérêts politiques et culturels, différence de façons d’être…). Deux commentaires possibles pour éclairer ce qui reste largement énigmatique pour moi : soit c’est la différence sexuelle qui nous sépare et m’attire vers elle, soit c’est la caractéristique de l’amour, cet objet qui s’offre et ne se possède pas. Lire Jacques Lacan m’a fait apparaître cette impossible mise en équation de l’amour, et j’ai accepté cette miraculeuse incertitude.
Du côté des dyades entraîneur / athlète, il y a l’incertitude  du résultat sportif et quant à la durée de la relation. J’ai rencontré mon premier athlète en juin 1978,......parmi ceux qui ont fait de moi un entraîneur
 J’avais vingt-huit ans ,  jusque là  j'avais été  surtout athlète même si   j'entraînais  des  camarades  de quartier ou de club   puis des  élèves  mais  sans   palmarès d’entraîneur. avec des   athlètes adultes
 J'ai entraîné dix ans. ce premier  sprinter  performant
Puis d'autres athlètes-phares, champions à un niveau régional,  national voire international  sélectionnés ou médaillés européens, rencontrés à  trente cinq ,quarante, cinquante  soixante ans.

À soixante-cinq ans, je continue à créer de nouvelles relations ou à raviver les anciennes. L’expérience des réussites et des échecs fait que les athlètes m’accordent un supposé-savoir-gagner dont je reconnais maintenant la fonction et que j’ignorais au début.

J’entraîne plutôt des hommes et la relation des athlètes à un père absent ou défaillant a souvent pesé dans mes collaborations. J’ai eu moi-même une relation conflictuelle à mon père. Cette dimension se répète et je ne la maîtrise pas. Dans mon groupe d’entraînement actuel, j’ai un ado de dix-neuf ans qui vit avec un beau-père ... d’autres vivent dans des familles recomposées.
Certains pères sont omniprésents en  compétitions , voire  assistent parfois aux entraînements  mais j'ai entraîné 10 ans un athlète international sans apercevoir une seule fois son père.........
Les athlètes me vouvoient, je les tutoie, je donne du relief à leurs efforts, je les amène à prendre appui sur leurs sensations corporelles que je ne connais pas et dont ils me parlent,; je commente techniquement, par  des images, -  tirez sur le paillasson - je leur trouve des noms, (  le king,   le signifiant majeur,  le dieu italo-grec  l'enfant gâté  le primus  le too much )afin de  singulariser  le sujet athlète  auteur d'exploits et de contre -performances que je  glorifie ou  raille , sans  confusion  avec la relation  humaine  déconnectée  du résultat sportif et même de la carrière sportive qui n'interrompt  pas  la  rencontre  du destin   … Cet espace du temps passé, donné aux athlètes, c’est parfois dans le corps vivant de l’athlète que s’en réalise l’intensité, dans l’après-coup de l’absence.
Ainsi pour vos athlètes, vous préférez le terme de dyade à celui de couple ?
Le couple, pour moi, présuppose le sexuel. Dans la relation aux athlètes, le sexe au sens usuel est en principe interdit, mais il s’inter-dit, se dit, se met en acte entre les lignes, à travers une relation d’amour à transférer à la technique. La durée du temps passé en présence, aux entraînements, en compétition et en stage provoque une grande intensité affective qui parfois passe dans la vie. Mon premier athlète, international, entraîné de ses quinze ans à ses vingt-quatre ans est devenu le parrain de ma fille, née quand il avait vingt-deux ans.  Il  en a 52  et je continue à le voir avec  un  grand plaisir   Ma meilleure athlète féminine a épousé un des athlètes, du groupe  après l’avoir accompagné à une compétition sur ma demande. Je suis invité au mariage de leur fille  prochainement .

Dans un mémoire  DEA  STAPS de 1990   sur  la relation  entraîneur entraîné  , une demande d'amour à transférer à la technique   je  cite   Marie-Josée Perec, triple championne olympique qui changea souvent d’entraîneur,   " François Pépin ( son  troisième  coach)  est un super entraîneur et je ne lui ai jamais rien reproché  :.... ça s'est  passé comme  pour un couple marié, ;Un jour ça ne va plus, on se sépare  .L'entraînement avec Michel  DACH c'est  pareil sauf qu'il n'y a pas d'histoires.....». Elle quittera  M  Dach puis J  Piasenta dans un fracas médiatique, avant de choisir un sixième  coach , allemand de l’Est, époux  de la détentrice  du record du monde  du 400 m   puis un septième ;....californien 

A  Sydney en 2000  PERSONNE   ne parvient à la  convaincre  de ne pas  renoncer  aux  Jeux Olympiques.dont elle est  une des deux grandes favorites. sur  400  m......

.MJP   quitte la capitale australienne sans disputer ses chances dans  l'incompréhension, ,la réprobation  générales  

MAIS   ce  forfait  inattendu  irrationnel  allait  ouvrir  la porte  à  un exploit  impensable , bien plus grand que la  performance athlétique de CATHY FREEMAN  


Cette athlète   australienne   choisie  par son pays pour  porter la flamme  olympique , autorisée  à  titre tout à fait exceptionnel  par le  CIO  à porter deux drapeaux ,australien et aborigène ...., gagne  plus que la médaille d'or  du 400  en  réconciliant  ?   tout un peuple  divisé  par   les drames   de l'émigration  européenne  sur  ce continent


Au coeur de l'individualisme  de la performance  il y a de la place pour  faire des dons en actes  d'amour  conscients et  inconscients   ?   

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